Les disparus (2): fausse rumeur sur un faux disparu...

 

 

 

 

Dans le quotidien « L'Echo de la Mayenne » daté du 9 mars 1915, on pouvait lire un entrefilet annonçant « la mort glorieuse » de M. Georges Foulon, vicaire à Mézangers, lors d'un assaut d'infanterie le 19 février de la même année. Le journaliste précisait quelques lignes plus loin, que le jeudi précédent, un service avait été célébré dans la paroisse de Grazay pour le repos de l'âme du Sous-lieutenant Foulon originaire de cette commune.

L'information fut notamment reprise par le Bulletin Paroissial d'Andouillé N°36 du 14 mars 1915 et par la Semaine Religieuse du Diocèse de Laval.

Somme toute, une nouvelle tristement banale en ces temps tragiques. En vérité nous en sommes loin ! Cette nouvelle, absolument fausse, sera démentie quelques jours plus tard dans les colonnes de ce même quotidien.

Retour sur ce « couac » journalistique d'un vrai-faux disparu.

 

1- Qui est Georges Foulon ?

 

Il est né à Grazay, commune du canton de Mayenne-est, le 3 octobre 1889. Georges Foulon effectue son service national en 1910 dans les rangs du 130e RI de Mayenne. Il est alors recensé comme étant étudiant en théologie. Georges est nommé caporal en 1911 puis sergent en 1912, pour être finalement renvoyé dans ses foyers en septembre 1912. Il loge un temps au 41 de la rue du Mans à Laval. En octobre 1913, il est nommé vicaire à Mézangers où il prend ses quartiers au presbytère.

L'abbé Foulon est rappelé à l'activité au 130e RI le 1er août 1914 et part pour le front avec son régiment le 5 août. Il est lancé dans les premières batailles de l'été à Mangiennes et Virton. Le 12 novembre 1914, Georges Foulon est nommé Sous-lieutenant à titre temporaire .

 

 

 

 

2- L'attaque sur Perthes-les-Hurlus

 

Le 19 février 1915, le 130e RI est chargé de mener l'assaut sur le bois 212 en avant de Perthes. Nous avons déjà relaté ici ce combat titanesque en sous bois par un temps pluvieux.

A 24 ans, Georges Foulon est chef de section à la 3e compagnie commandée par le Sous-lieutenant Raoul Hyon, du même âge, originaire de Paris et Saint-Cyrien de la promotion des « Marie-Louise 1911 1913 ». Le troisième officier de l'unité est le Sous-lieutenant Henri Mitraud, 21 ans, originaire de Haute-Vienne.

A 6h00, les 4e (Lieutenant Ecorcheville) et 3e compagnies attaquent de concert la lisière sud du bois 212. Rapidement, des feux de face et de flanc clouent les hommes sur place. Dans la mêlée, tous les cadres disparaissent. Si le JMO mentionne effectivement les Sous-lieutenants Hyon et Mitraud comme disparus, leur camarade Foulon apparaît dans la liste des tués, avec cependant un point d'interrogation qui en dit long sur la certitude des pertes.

Incertitude qui s'explique aisément puisque bon nombre d'hommes sont restés entre les lignes et qu'il est donc difficile de savoir s'ils sont morts ou non.

 

 

 

 

3- Le méa-culpa de l'Echo de la Mayenne

 

Dans son édition du 21 mars 1915, soit 12 jours après la fausse annonce du décès de Georges Foulon, le quotidien lavallois publie deux extraits de lettres adressées au frère de l'officier, vicaire à Saint-Denis-de-Gastines, qui démentent la version de la mort de l'abbé.

 

Le premier extrait n'a pas d'expéditeur nommé : « Monsieur l'abbé. Je voudrais bien vous faire savoir que monsieur l'abbé votre frère est prisonnier de guerre depuis le 20 février. Il se porte très bien. Il dit sa messe tous les jours ... »

 

Le second est envoyé par l'abbé de Salles, aumônier du 130e RI : « L'abbé Georges Foulon a disparu vers 6h00 du matin dans une première charge contre les tranchées Allemandes à Perthes. Il est certain qu'une partie de sa section a été faite prisonnière et je compte qu'il a dû subir le sort des soldats de sa compagnie qu'il avait si brillamment menés à l'assaut et que son calme et son sang froid ont dû sauvegarder au moment critique où toute résistance devenait impossible. Comme la première attaque de 6h00 du matin s'était portée en avant des tranchées que nous avons conquises vers 11h00, il est encore impossible d'identifier les morts qui sont en avant de nos lignes, il faut attendre que nous avons fait un nouveau bond en avant. Malgré certains ont-dit, je ne croirai à la mort de M. l'abbé Foulon que lorsqu'on l'aura identifier parmi nos victimes... »

 

Le JMO du régiment, à la date du 31 mars 1915, mentionne la citation dont est l'objet Georges Foulon en précisant qu'il a été blessé et non tué le 19 février. La fiche matricule fait d'ailleurs état d'une « cicatrice adhérente au tympan gauche ».

La confirmation de la captivité de l'officier mayennais viendra de la publication dans la « Gazette des Ardennes » du 7 mai 1915 d'une liste de prisonniers où apparaît Foulon Georges, lieutenant, Grazay, Mayenne, inf 130.

La fiche matricule fait référence à 3 lieux d'internement : Stralsund (Mecklembourg-Poméranie occidentale), Gütersloh (Rhénanie du nord-Westphalie) et Halle (Saxe-Anhalt).

L'abbé Foulon sera finalement rapatrié le 3 décembre 1918 et fera son retour au 130e RI le 5 février 1919.

Il ira habiter Saint-Hilaire-du-Maine en 1919, Ernée en 1923 puis Désertines en 1928.

Georges Foulon sera définitivement rayé des cadres en octobre 1938.

 

 

Sources :

 

- Echo de la Mayenne, Archives Départementales de la Mayenne, 1Pe 34/73

- JMO du 130e RI, SHD Terre, série 26 N  687/1

- Semaine Religieuse du Diocèse de Laval, BMP Albert Legendre (Laval)

- Fiche matricule de Georges Foulon, Archives Départementales de la Mayenne  R1958

 

 

 

 

 

 



06/01/2013
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