Le Lieutenant Raymond Sesboué

 

 

 

 

 

Né le 18 février 1890 à Château Gontier. Il est le sixième enfant d'une famille qui en compte dix. Son grand-père, Félix Sesboué, était notaire dans cette même ville. Son père, Daniel Sesboué, fin musicien et animateur du Cercle Catholique, décède en février 1900. Son grand-père maternel, Amédée Petit, était architecte à Paris.

Raymond Sesboué fréquente tout d'abord l'institution Saint-Michel de Château-Gontier, puis obtient ses baccalauréats latin-grec et mathématiques à Angers où sa famille a déménagé. Puis il suit les cours d'une classe préparatoire à Saint-Cyr au collège Saint-Vincent de Rennes à la rentrée 1907.

Promotion Saint-Cyr « De Mauritanie 1908/1911 ». Affecté comme Sous-lieutenant au 3e régiment d'infanterie coloniale en octobre 1911 à Rochefort. En mai 1912, il part pour le Maroc et rejoint le 2e régiment de marche. Il est fait officier du Ouissam Alaouite à l'issue d'une reconnaissance près de Moktar-el-Hammadi en avril 1913. Au printemps 1914, Raymond Sesboué fait partie de la colonne Gouraud qui entre à Taza et est cité à l'ordre du jour des troupes « pour son entrain, son esprit de décision et les qualités militaires qu'il a déployées à la tête de son peloton, pendant les combats de Taza et de la montagne des Tsouls les 10 et 12 mai 1914 ». Rapatriable en juin 1914, il rentre en France et est affecté au 8e régiment d'infanterie coloniale de Toulon.

 

 

 

Comme beaucoup d'officiers, Raymond Sesboué est ravi par la mobilisation générale. Il écrit à l'un de ses frères :  « D'abord faisons bien notre métier et châtions l'ennemi héréditaire, dont l'insolence nous a refait une âme commune. Je la sens chez tous ces hommes, indifférents ou frondeurs il y a quelques années, prêts maintenant à donner le bon coup. Comme toi, j'ai confiance et sans réserves. La lutte sera très dure, car les Allemands sont de rudes adversaires, mais nous les battrons. Nous ne partons de Toulon que le 9 août, je n'aurai donc pas l'honneur des premiers combats. Tu seras sans doute sur la frontière avant moi, mais tu nous laisseras bien encore de bon ouvrage. Allons, au revoir ou adieu, peu importe, dans quelques mois, dans la France redevenue libre du cauchemar, dans l'Allemagne foulée ou dans la phalange des héros tombés durant des siècles pour faire la France ».

 

Le 8e RIC quitte Toulon le 9 août 1914. Raymond Sesboué est chef de section à la 7e compagnie commandée par le capitaine Gilette. Le régiment est rattaché à la 2e division coloniale du corps d'armée colonial. L'unité est engagée dans la bataille des frontières et investie Pin (Belgique) le 22 août. Deux jours plus tard, commence la retraite vers la Marne. Raymond Sesboué reste confiant : « Je garde l'espoir, la France a fait preuve depuis des années de trop de vitalité pour qu'elle ne force pas le destin » écrit-il.

De combats en escarmouches, le 8e RIC stoppe le 5 septembre 1914 sur le front Brignicourt/ côte 109. On ne recule plus ! La poursuite s'engage dès le 11 septembre.

Raymond Sesboué s'enthousiasme : « Depuis trois jours nous luttons et, pour la première fois, nous n'avons pas reculé après le combat. La confiance nous revient, à sentir que l'ennemi n'est pas invincible. Pour moi ce sera le bonheur quand le succès reviendra complètement sous nos drapeaux. La victoire sera au plus persévérant et nous voulons durer ».

Le 15, le régiment s'enterre sur ses positions près de Massiges. La guerre de tranchées s'amorce.

Le régiment occupe les deux mamelons à l'ouest de la côte 191. Jusqu'à la fin septembre, l'ennemi ne manifeste pas d'activité sérieuse. L'état major français prévoyait une reprise des opérations et envisageait d'attaquer le 26 septembre.

 

Ce samedi 26 septembre 1914, une violente préparation d'artillerie contre tout le front de la IVe armée se fait entendre vers 3 heures. A 4 heures, l'infanterie allemande donne l'assaut dans un brouillard intense.

 

 

Fond de carte: SHD Terre 26 N 467

 

 

Le 8e RIC garde ses positions. Mais à droite, le 4e RIC perd la côte 191. Deux tranchées sont prises. A gauche, le 24e RIC perd la côte 180.

Les pièces de 75 positionnées sur la côte 199 écrasent les troupes allemandes sur les tranchées de 191. Leur élan est brisé et les pertes ennemies sont énormes.

Le régiment envoie alors la 7e compagnie du 8e colonial du capitaine Gilette en contre attaque avec un bataillon du 4e RIC sur 191. Dès 6 heures, les positions perdues sont reprises. Mais les pertes sont lourdes. Le lieutenant Raymond Sesboué est grièvement blessé. Le capitaine Gilette est tué.

 

 

 

 

Le village de Courtémont (51) en 2011. Ici siégeait l'ambulance N°1 du corps colonial.

L'habitation actuelle n'est sans doute pas d'époque.

 

 

 

Raymond Sesboué est touché par une balle au ventre. On l'amène rapidement au poste de secours du 8e RIC à Massiges. Là, son état est jugé très grave et il est transporté en auto à l'ambulance N°1 du corps colonial établie à Courtémont. Le jeune officier a encore la force d'écrire quelques mots à sa mère : « Je suis blessé, c'est grave... Nous avons été vainqueurs, je ne regrette rien ».

L'aumônier de la division assiste ses derniers instants et lui administre les sacrements. Raymond Sesboué s'éteint lentement le 27 septembre 1914. Le même jour, il est inhumé au cimetière de Courtémont près de l'église.

 

 

La plaque apposée dans l'église de Courtémont porte toujours le nom de Raymond Sesboué.

 

 

 

Le 11 novembre 1914, Raymond Sesboué est cité à l'ordre de l'armée en ces termes : « Grièvement blessé le 26 septembre 1914 en repoussant une attaque d'infanterie ennemie en Champagne ».

 

Le jeune mayennais avait écrit peu avant de mourir: « Dans la lutte pénible où l'Allemagne a porté toutes ses forces contre nous, nos sorts individuels disparaissent ».

Deux de ses cinq frères tomberont eux aussi durant le conflit. Pierre, sous-lieutenant au 106e RI, décèdera en juin 1916. Daniel, caporal au 135e RI, s'éteindra le 26 septembre 1914, un jour avant Raymond. Nous reviendrons prochainement sur ces deux frères Sesboué. 

 

 

 

Un grand merci à Alain pour les prises de vue sur Courtémont. 

 

 

Sources :

  • Livre d'Or du collège Saint-Vincent de Rennes (Merci à Thierry pour sa transmission )

  • Historique du 8e RIC, 1920

  • La Main de Massiges, Général Rouquerol, Payot 1933

  • JMO de la 2e DIC, SHD Terre 26 N 467

  • JMO du 8e RIC, SHD Terre 26 N 864



13/02/2011
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